Comment percevez-vous aujourd’hui les principaux facteurs de stress ou de fragilisation psychologique chez les collaborateurs d’une entreprise ?
Aujourd’hui, trois principaux facteurs fragilisent la santé psychique des collaborateurs. La première concerne la surcharge cognitive, alimentée par une hyperconnexion permanente qui épuise les ressources attentionnelles des collaborateurs au quotidien.
La deuxième relève de l’incertitude organisationnelle, marquée par des changements rapides souvent mal accompagnés, qui entretiennent un climat d’instabilité. Cette fragilité est d’autant plus accentuée par le contexte social français actuel, qui renforce le sentiment d’incertitude.
Enfin, on observe depuis plusieurs années une perte progressive du sens au travail. L’hyperdigitalisation accentue ce phénomène en transformant parfois l’expérience professionnelle en une succession de tâches dématérialisées, ce qui finit par user la motivation et fragiliser la santé psychique des collaborateurs.
À ces facteurs s’ajoute un brouillage croissant des frontières entre vie professionnelle et vie personnelle, qui prive nombre de collaborateurs de la possibilité de réellement se déconnecter et de récupérer.
Quelles initiatives ou dispositifs les entreprises peuvent-elles mettre en place pour favoriser le bien-être et la santé mentale ?
Les dispositifs pertinents reposent sur une articulation claire entre prévention primaire, secondaire et tertiaire. La prévention commence par des actions de terrain comme organiser la charge de travail, clarifier les priorités et former les managers à repérer les signaux de fragilité. Ces mesures doivent ensuite s’inscrire dans un plan structuré intégrant des espaces d’écoute, un accompagnement psychologique et un management outillé. Cette continuité permet de bâtir une démarche de prévention cohérente, durable et vectrice de sens.
Comment mesurez-vous l’impact de la santé mentale sur la performance, la motivation et la fidélisation des salariés ?
La santé mentale pèse directement sur le quotidien des collaborateurs. Dans les faits, 47 % des salariés déclarent travailler moins efficacement en raison de leur état psychologique, et 21 % voient leur motivation baisser quand le stress s’installe.
Plus préoccupant encore, 34 % envisagent de quitter leur entreprise pour préserver leur santé mentale. Autrement dit, la santé mentale reste mesurable malgré son caractère moins bruyant et les chiffres soulignent un besoin urgent de prise en charge pour les entreprises françaises.
Selon vous, quelles actions prioritaires devraient être renforcées ou créées pour améliorer durablement la qualité de vie et prévenir l’épuisement professionnel ?
Les actions à mettre en place doivent s’inscrire dans une démarche structurée et porteuse de sens pour l’ensemble des collaborateurs. La première étape consiste à mesurer le climat social et le capital humain grâce à des baromètres réguliers. Cette étape fournit une base pour analyser les indicateurs quantitatifs et qualitatifs et ainsi élaborer un plan d’actions concerté avec les différentes parties prenantes de l’entreprise (direction, collaborateurs, CSE). Ce plan doit articuler l’ensemble des niveaux de prévention afin d’assurer une réponse cohérente.
Enfin, l’intégration d’une boucle d’amélioration continue, articulée autour de bilans périodiques, permet non seulement d’évaluer l’impact des actions engagées mais aussi d’anticiper les évolutions du climat social et de redéfinir les priorités de prévention de manière stratégique.